Interview

QUES7IONS - Michaël Sanlaville

Publié le 3 février 2023
Michaël Sanlaville
Michaël Sanlaville

Question 1 / Bonjour Michaël, tu es comme Neo, tu es l’élu de cette session de questions-réponses. Malheureusement, peut-être que certains humains ne te connaissent pas ces mécréants et cloportes indignes. Les boomers disaient “SLT ASV” mais toi, pourrais tu te présenter ?

Affirmatif ! Michaël Sanlaville, né le 6 juillet 82 à Lyon. Formé au dessin à l’école Emile Cohl et à l’animation aux Gobelin, j’ai longtemps travaillé dans les studios parisiens avant de me consacrer à plein temps à la BD en 2012 sur le projet LASTMAN chez Casterman. J’adapte ensuite les aventures de San-Antonio, toujours chez Casterman. Aujourd’hui c’est l’aventure Banana Sioule, chez Glénat. Je suis un amoureux du dessin et même si j’en ai fait mon métier, je ne le prends pas au sérieux. Je dessine comme un gamin qui se fout de la tronche de son prof, dans les marges de son cahier. Rien n’a changé depuis cette époque...

Question 2 / Hannibal disait “j’aime qu’un plan se déroule comme prévu”. On a tous des rêves d’enfants qui ne se sont pas forcément déroulés comme prévu. Et alors donc, tu voulais devenir quoi en étant petit(e) ?

Je voulais devenir Barracuda mais j’ai finalement choisi Michaël Knight... Je n’avais pas vraiment de rêve étant petit. Un gamin chétif, sans ambition, perdu dans la lecture de pages de BD. Le dessin l’a donc très rapidement emporté sur tout le reste... Exit vétérinaires, pompiers et astronautes... et tant mieux.

Question 3 / On grandit, on grandit et – si on a pas le syndrome de Peter Pan – on murit, grâce à des principes et des gens. Comme disait Kyan (Khojandi), “Des fois, tu parles à des gens. Tu crois que c’est les bons gens. En fait, c’est pas les bons gens.” Et toi, qui sont tes bons gens, tes inspirations ?

Mes amis proches, fidèles, qui sont ceux que j’ai représentés dans Banana Sioule. Je crois aux vertus de l’amitié plus qu’à tous les dictons du monde. Je considère également Frédéric Dard, l’auteur de San-Antonio comme une sorte de père spirituel. Je me plonge régulièrement dans la lecture de ses pages et il m’interpelle souvent au fil de ses aventures.

Question 4 / J’ai vraiment adoré l’adaptation de San-Antonio en BD. Le style est très différent des premières adaptations (déso p’pa), mais le ton de Frédéric Dard est bien là. Comment s’est passé le processus d’adaptation ?

Le plus simplement du monde car j’ai mûri tous ces personnages pendant toute mon adolescence et il sont donc sortis tout naturellement. Aucun problème. Je me suis juste inspiré de Alain Delon pour construire San-Antonio. Sa beauté féline et froide me plaisait bien. Difficile car il apparaît tellement beau qu’il me fallait un visage iconique qui fasse l’unanimité. On aime ou on déteste Delon, mais, il est beau ! C’est indéniable.

Pour adapter l’enquête en elle-même, rien de plus facile, sauf quand Frédéric Dard lui-même s’emmêle un peu les pinceaux dans son enquête. C’est d’ailleurs ce qui est le cas dans «San-Antonio chez les gones ». C’est marrant, j’ai du ré-écrire un peu l’histoire pour que la chronologie se passe correctement. Mais on sait tous que certaines de ses enquêtes ne sont que des prétextes pour délirer. A l’inverse « Si ma tante en avait » est un petit bijou d’orfèvrerie.

Question 5 / J’avais envie de te poser une question sur la bouffe en hommage à Bérurier car j’aime le personnage. Mais toi, quel est ton personnage favori ? Sur les SanA que tu as lus, il y en a t’il un que tu préfères ?

Marie-Marie gamine, la nièce de Bérurier, car elle ne devrait pas être là, au milieu des enquêtes, à jurer, vociférer, insulter,….Mais adolescente encore plus car elle me permet de tourner Sana en ridicule et d’ouvrir sur un discours presque féministe. L’idée étant, avec la bd, de rendre accessible un personnage un peu tombé dans l’oubli, tout en étant strictement fidèle au texte.

Question 6 / Je pense qu’on ne peut pas connaître le futur, sauf si on est un Terminator ou si on a une De Lorean. Mais on sait ce que l’on est en train de faire pour créer “son futur”. Tu viens de sortir Banana Sioule, tu peux nous en dire plus ?

Banana Sioule, c’est mon vécu, mais bien maquillé. J’ai eu envie de mettre en pause les univers testostéronés, grotesques ou grivois pour raconter l’adolescence et le passage de l’école au monde professionnel. Bon, la Sioule reste une discipline assez musclée mais ce n’est que la vitrine…J’ai horreur des bd qui donnent des leçons, alors j’ai imaginé cette histoire pour que des ados les tirent par eux-mêmes.

C’est aussi l’occasion pour moi de revisiter un genre que j’affectionne particulièrement dans le manga : le Shonen Nekketsu (cad le récit à l’attention des jeunes garçons japonais) et d’en tordre la recette pour en faire un récit plus personnel.

Question 7 / Au top à la vachette tu pars sur une île déserte avec un seul blu-ray, cd et/ou livre. Tu prendrais quoi et pourquoi ?

Terminator 2, de James Cameron. Le rapport aux machines m’a toujours fasciné. Quand je travaille, je pense souvent à la production, au rythme, et à la force de frappe d’une machine. Et surtout la thématique du film, tellement d’actualité avec tout le bazar lié aux intelligences artificielles.

Merci encore d’avoir répondu à QUES7IONS. Un message, ou un mot de la fin peut-être ?

Apprendre San-Antonio à l’école primaire et imposer Street Fighter dans les maisons de retraites.